Entretien : Personnels handicapés et/ou malades face à l’administration




L’association ANTHEN - Association nationale des travailleur-ses en situation de handicap ou de maladie invalidante (ALD) de l’Education nationale s’est constituée pour alerter et défendre la situation de ces personnels face au non-respect de leurs droits par l’administration. Entretien avec Raphaël Descamps, l’un des fondateurs de l’association. Dans quelles circonstances a été créée l’association ANTHEN ? Au départ, ANTHÉN puise ses racines dans la démarche revendicative des Stylos Rouges. C’est en parcourant les diverses pages FB nationale et académiques des SR qu’un des fondateurs, confronté à sa propre réalité quotidienne des difficulté d’être travailleur « malade » de l’Éducation nationale en général, instit en particulier, s’est rendu compte du malaise général des collègues handicapés, ou frappés par une maladie invalidante. Une page spécifique a, donc, été lancée dans la foulée avec une première mission précise : élaborer, avec quelques collègues concernés, une charte revendicative sur la problématique des « H&A » (personnels handicapés et/ou frappés par une ALD (affection de Longue durée) et toute forme de maladie invalidante). La suite a consisté par la mise en place d’informations précises sur nos droits, le tout alimenté par les échanges des collègues. Quelles sont les principales difficultés rencontrées par les travailleurs et travailleuses en situation de handicap ou d’ALD au sein de l’éducation nationale ? Elles sont nombreuses !!! Sans surprise, c’est le manque d’information qui est arrivé en tête. Ajoutons que le manque d’harmonisation entre les académies et les départements d’une même académie viennent encore alourdir le chemin de croix des personnels « H&A ». Quelles sont les principales revendications d’ANTHEN ? Toutes celles et tous ceux qui veulent les étudier en détail pourront le faire en visitant notre site internet (http://www.anthen.fr) En gros, les revendications correspondent au règlement des problèmes observés ci-dessus. Un meilleur traitement humain des collègues concernés, une information mieux organisée avec des personnels et des instances adaptées, avec notamment des cellules de suivi capables de prendre des décisions dans l’urgence font partie d’un premier socle revendicatif auquel il convient d’ajouter la création d’une véritable médecine de travail. La clarification des procédures et leur caractère universel (…mot qu’ils aiment en haut lieu…), de vraies alternatives de reconversion et de maintien dans l’emploi, ou, encore, une formation continue accessible et adaptée nous semblent, également, indispensables. Enfin, les problèmes financiers auxquels sont confrontés les collègues en raison de leurs difficultés liées à leur santé et l’engagement du Ministère pour financer le soutien à l’amélioration des conditions matérielles de travail des personnels « H&A » demandent une vraie réflexion pour de réelles améliorations de notre vie quotidienne. Comment ANTHEN se positionne-t-elle par rapport à la réforme des retraites ? Pour nous le compte n’y est pas, mais vraiment pas ! Dans un tel contexte où le « marche ou crève » deviendrait la norme, les personnels, fragilisés par un état de santé déficient, verraient leur situation péricliter et leurs souffrances et leurs difficultés d’arriver au bout de leur carrière s’accroitre. Dans ces conditions beaucoup auront du mal à arriver à la retraite sans y laisser de nombreuses plumes, notamment si on considère que la rémunération au mérite va s’amplifier. Difficile d’être handicapé ou malade et méritant dans leur vision des choses… Les textes actuels sur les départs anticipés pour handicap sont déjà notoirement insuffisants. Les propositions extrême-libérales qui vont conduire à un recul sans précédent de nos conditions de vie et de travail ne vont faire qu’aggraver la situation de tous, en général, et celles des plus fragiles, en particulier. En tout état de cause il nous semble urgent de réfléchir à la mise en place d’un système qui s’apparenterait à l’ancienne CPA (Cessation Progressive d’Activité), de prévoir des postes aménagés en nombre suffisants, d’innover en créant des postes de soutien, de définir des critères de pénibilité et de conditions spécifiques de départ en retraite des personnels handicapés et/ou en RQTH… Quelle sont les prochains objectifs de l’association ? Aujourd’hui, une de nos principales tâche est de faire prendre conscience aux collègues concerné(e)s par nos problématiques que le renforcement de l’Association est incontournable pour peser sur le cours des choses. Soit chacune et chacun reste dans son coin et essaie, tant bien que mal, de survivre à ses problèmes, soit une organisation capable de parler et d’agir, tant au plan national, qu’auprès des Rectorats et des Inspections académiques - et même de chaque établissement - soutient les collègues en difficulté pour que soient appliqués les textes. Chacune et chacun doit prendre conscience qu’on ne respecte que les gens qui se font respecter, jamais les autres… La société et nos propres métiers ont perdu le sens du collectif. Si l’association n’est pas entendue par le Ministère, est-ce qu’elle envisage d’autres modes d’action ? Si nous ne sommes pas entendus, les situations dramatiques vont se multiplier. Nous connaissons déjà trop de drames liés aux problèmes psycho-sociaux du travail. Si le ministère n’impulse pas une politique de prise en compte (et de règlement…) des problèmes liés aux handicaps et aux maladies invalidantes, à tous les échelons territoriaux, nous n’aurons pas d’autres choix que de dénoncer publiquement les discriminations dont feront l’objet les collègues en raison de leur handicap ou de leur maladie chaque fois que nécessaire. Parallèlement, à terme, un accompagnement des collègues auprès des Juridictions compétentes ou des structures comme le Défenseur des Droits pourra être mis en place. Tant que nous n’avions pas une reconnaissance légale de par notre statut associatif, le ministère nous ignorait. Raphaël Descamps 5-01-20 |