"Esprit critique es-tu là ?", N’autre école n°6 est sorti !

Entretien avec Jean-Pierre Fournier, coordinateur du nouveau numéro de N’autre école "Esprit critique es-tu là ?".

QdC : Tu as coordonné le numéro 6 de la revue N’autre école "Esprit critique es-tu là ?". Peux-tu nous dire en quoi cette thématique est importante pour toi et pour celles et ceux qui veulent penser une pédagogie critique ?

JPF : C’est important parce qu’il y a une fausse évidence : officiellement, cultiver l’esprit critique est un des buts de l’enseignement. On devrait donc consacrer beaucoup d’attention à sa mise en oeuvre. On sait qu’en réalité ce n’est pas le cas ni pour les élèves, ni pour les parents, ni pour les enseignants. Les objectifs sont plus quotidiens (pas forcément illégitimes) mais l’ambition émancipatrice est souvent voire généralement oubliée. C’est pourquoi il est indispensable de la rappeler.

Et encore plus aujourd’hui : la présence lourde des défenseurs des obscurantismes, des climato-sceptiques, des complotistes, l’existence jusque dans l’extrême-gauche de complaisances dans ces domaines, le ton de dérision systématique des trolls organisés des réseaux sociaux, tout cela fait partie du paysage, et de notre paysage scolaire aussi. Cela renforce la nécessité de travailler ce sujet.

QdC : Comment ce thème est-il abordé dans ce numéro ?

JPF : Très concrètement, en rapportant des expériences où les élèves sont placés dans des situations où leurs représentations sont "dérangées", selon l’expression de Jean-Louis Cordonnier, auteur d’un désopilant roman-photo éducatif, une rareté... et une réussite. Il s’agit souvent de travaux en sciences, terrain privilégié de l’esprit critique - ou qui devrait l’être ! Mais bien sûr, la philo est également de la partie.

QdC : L’esprit critique, c’est l’enseignement, ou ça dépasse ce cadre ?

L’enseignement, mais toute l’école, avec la question de l’évaluation ; on en a beaucoup parlé ces dernières années, il y a eu des avancées dans les pratiques, un article évoque donc cet aspect. Et, au-delà de l’école, les phénomènes de croyances, de fermeture d’esprit voire pires, sont le lot de toute la société ; les milieux militants de "notre côté de la barricade" n’y échappent pas, et la revue n’esquive donc pas la question.

QdC : On est surpris de lire les avis de journalistes éducation connus et appréciés (France Culture, Le Monde) dans les colonnes de la revue. Peux-tu nous dire les raisons de leur présence ?

Louise Tourret et Luc Cédelle connaissent bien leur rubrique et suivent avec intérêt et sympathie les efforts des pédagogues et militants que nous sommes, sans être rebutés par notre engagement social. Ce n’est pas si fréquent ; raison de plus pour leur donner la parole, une parole franche, qui pourra déranger… mais c’est ça aussi, l’esprit critique.

Propos recueillis par François Spinner
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