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Questions de classe(s)

Les 3 intuitions indispensables de la Pédagogie Sociale

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La pédagogie sociale repose sur des principes qui sont émancipateurs et « autorisateurs ». Ce sont des principes dynamiques qui tranchent complètement avec l’ambiance générale qui prévaut dans le secteur social et éducatif.

Alors que toutes les tendances règlementaires, législatives, administratives poussent à toujours plus d’empêchements, de limitations et de restrictions, la pédagogie sociale propose d’envisager l’action éducative et sociale à partir de 3 intuitions qui « donnent de l’énergie », la légitiment et la soutiennent.

Première intuition indispensable : « Ca ne va pas s’arranger »

La première intuition pourrait paraître curieuse ; elle repose sur l’idée que les problématiques sociales que prend en compte la pédagogie sociale ne sont ni fortuites, ni irrationnelles, ni temporaires ou accidentelles.

L’action sociale traditionnelle a hérité de ceci qu’elle perçoit et définit les problématiques auxquelles elle prétend répondre (exclusion, handicap, insertion), sur le mode des l’anomalie. Le retour à l’équilibre, à la normale et à l’intégration s’imposent comme des objectifs d’autant plus obligatoires qu’ils sont implicitement compris dans le diagnostic lui même. C’est AU-TO-MA-TI-QUE .

Malheureusement nous assistons depuis la fin du XXème siècle à des désaffiliations de masse et des phénomènes de déliaison et de sécession sociales qui ont beaucoup plus à voir avec la chronicité, le systémique et le structurel qu’avec une forme d’accident réparable.

La Pédagogie sociale ne propose aucun retour à l’ordre ou à la normale. Elle ne se donne pas pour objectif de renvoyer les personnes en difficulté dans des institutions où elles ne trouvent plus de place . Elle ne trouve son sens que dans la durée, dans la création de nouveaux systèmes et de nouveaux paradigmes. Il ne s’agit plus de « faire entrer des carrés dans des ronds », d’adapter les personnes à des modalités et pratiques inadaptées, mais d’en créer de nouvelles.

Or, rien de cela ne peut être tenté si on n’a pas fait le deuil « d’un retour naturel à la norme ».

On travaille beaucoup plus efficacement quand on admet la réalité telle qu’elle est , pour la transformer, quand on comprend enfin que la Crise ne va pas s’arranger car la crise est devenue le mode de fonctionnement de la société elle même. Et ainsi de la précarité, de la relation au travail, de la famille qui se délite, etc…

Nous sommes dès lors tous convoqués par ce « Ca ne va pas s’arranger »… à un grand chantier.

Seconde intuition indispensable : « Je suis la bonne personne ».

Ce que la Pédagogie sociale nous apprend également c’est qu’il ne sert à rien de rechercher les bons interlocuteurs et les spécialistes qui seraient bien mieux qualifiés que nous pour résoudre les problèmes auxquels nous nous confrontons.

Cette recherche un peu idéale du « réparateur » et du « spécialiste » que nous ne serions pas et qui, forcément aurait LA solution qui nous fait défaut , est bien entendu un mythe.

Si un tel être providentiel existait, le problème, lui, aurait disparu depuis longtemps. Non, à notre grand dam, quelque fois, nous nous devons d’affronter cette évidence : nous sommes la bonne personne puisque c’est à nous que l’on ou que ça s’adresse.

Ne pas pouvoir « refiler le bébé » est toujours forcément dérangeant. Il n’est pas étonnant que les pratiques classiques du travail éducatif et social fassent l’éloge du contraire : du pseudo réseau qui porterait les situations et les responsabilités avec nous, du relai vers les collègues, ou vers l’équipe ou l’institution idéale.

Nous avons conservé depuis des 30 glorieuses cette croyance dans l’existence (et donc aussi sa recherche) de l’institution idéale. De façon coutumière il a été et il est encore fréquent que des professionnels et des équipes , affirment que l’institution ne serait pas adaptée à l’accueil de tel ou tel cas difficile et on se rabat sur la croyance que peut être « ailleurs » ce serait mieux pour tout le monde et même « pour elle »…

Une telle tendance peut être compréhensible et parait bien humaine, mais on doit aussi dénoncer que cette attitude vient conforter encore et toujours le pratiques d’exclusion les plus banales.

En pédagogie sociale, les choses sont plus simples : c’est à nous que ça s’adresse et pour un temps, au moins, nous aurons à composer avec qui nous convoque, qui nous active et qui nous sollicite.

Cela pourrait paraître trop difficile ou exigeant mais c’est également paradoxalement quelque chose de rassurant et qui, au fond, nous légitime.

Troisième intuition indispensable : « Nous sommes à la bonne place, au bon endroit ».

Le Travail social est souvent traversé par cette affirmation omniprésente « que ce n’est pas l’endroit », « que ce n’est pas la bonne place », « pas le bon lieu » , pour tout ou n’importe quoi. Renvoyer les usagers vers d’autres lieux, d’autres espaces est perçu comme une attitude professionnelle et structurante ; mais c’est aussi une posture commode pour se déclarer incompétent.

Mais il y a aussi de la crainte sincère dans une telle affirmation. On est réellement et authentiquement inquiets de travailler avec les gens dans le lieu où ils sont . On a tendance à rêver d’espaces et de structures mieux équipés. On s’imagine volontiers qu’ailleurs ce serait forcément mieux.

On est ainsi souvent à notre insu ,impliqués dans la dévalorisation de nos propres espaces, de nos propres terrains et de nos propres locaux. Ils ne ressemblent pas à ce qu’il nous semble qu’ils devraient être.

Mais ce faisant, nous oublions une vérité fondamentale ; nous sommes forcément adaptés à notre terrain comme des graines qui auraient poussé là.

En pédagogie sociale, il y a une expérience très répandue , que ressentent les pédagogues sociaux, mais aussi les volontaires, les bénévoles et les stagiaires. Il s’agit d’un sentiment qui nous gagne rapidement sur nos ateliers, nos bidonville set nos terrains.

Petit à petit une certitude s’impose à nous , tout naturellement, tout simplement : nous sommes exactement là où il faut être.

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