![]() L’importance et la pérennisation de l’implantation des extrêmes droites à Lyon est remarquable à plus d’un titre. En premier lieu, c’est leur diversité qui frappe : on trouve en effet dans l’agglomération lyonnaise la plupart des partis, mouvements ou groupuscules d’extrême droite, des plus anciens aux plus récents, de l’Action française à l’ex-Bastion social, des nationaux-catholiques aux néo-païens, des activistes violents aux électoralistes frontistes. Une implantation particulièrement dense Lyon est aussi remarquable par la densité de cette implantation, concentrée, à l’exception du Rassemblement national, dans les quartiers médiévaux ou Renaissance du Vieux-Lyon, où ils ont ouvert locaux associatifs, salles de sport, bars et magasins, signe d’une volonté de s’approprier ces quartiers. Leur présence se manifeste à travers collages, tractages, manifestations, mais aussi démarches prosélytes (conférences, maraudes pour les sans-abris français), et enfin, pour certains groupes, actes violents, dégradations de locaux et agressions. Une telle présence mérite d’être étudiée et demande une analyse des conditions qui l’ont rendue possible. C’est l’objet de ce livre qui vise à la rendre plus explicable pour le public, que celui-ci y soit confronté ou qu’il la découvre dans les faits divers de la ville. L’ouvrage explore les principales pistes, tenant à l’histoire ou à la sociologie lyonnaises, qui permettent de rendre compte d’une telle situation. Le bénéfice d’alliances électorales Un des premiers points notables est la prédominance dans la vie politique lyonnaise, depuis la fin de la seconde guerre mondiale et jusqu’aux années 2000, d’un centre droit plus électoraliste qu’idéologique et peu soucieux de la présence de l’extrême droite, pouvant aller jusqu’à s’allier avec elle en période électorale comme en témoigne l’accord passé entre l’UDF Charles Millon et le frontiste Bruno Gollnisch pour les élections régionales de 1998. Dans le même temps, le Front national, s’il s’est implanté de longue date, obtient des résultats électoraux modestes et s’avère lui aussi, à travers la personnalité de Bruno Gollnisch, ouvert à des alliances ou des contacts tant à droite qu’avec les groupuscules radicaux. Par exemple, en 2010, présentant sa candidature à la présidence du FN, Gollnisch choisit comme directeur de campagne un cadre du groupuscule nationaliste L’œuvre française, alors même que Marine Le Pen en dénonçait l’entrisme. Ces rapprochements et ces alliances sont favorisés par l’importance dans la vie publique lyonnaise de la religion catholique, qui joue un rôle fédérateur, symbolisé par le « vœu des échevins », cérémonie officielle au cours de laquelle le maire met chaque année la ville sous le patronage de la Vierge Marie (le maire EELV élu en 2020 a refusé d’y participer). Cette prégnance du catholicisme permet à une partie des extrêmes droites de se donner figure honorable en s’affichant chrétienne, un groupuscule comme Génération identitaire allant jusqu’à organiser chaque année sa propre procession mariale. Un creuset idéologique pour les extrêmes droites radicales Enfin, l’histoire récente a conféré à Lyon un rôle de matrice idéologique avec la présence à l’Université Lyon III, dans les années 1980 et 1990, à côté de Gollnisch qui y a enseigné pendant trois décennies, d’un nombre important d’universitaires se réclamant des théories identitaires ou racialistes (c’est à Lyon qu’est fondé le GRECE en 1968), permettant de donner une caution universitaire à la « guerre culturelle » revendiquée par les extrêmes droites radicales. Tel apparait le terrain sur lequel ont pu prospérer, dans l’agglomération lyonnaise, les extrêmes droites dans leur diversité. Si on ajoute à cela la capacité des groupuscules à oublier leurs divergences pour mener la bagarre et à se reconstituer après leur éclatement ou leur dissolution, on a là des éléments qui permettent de comprendre pourquoi Lyon a pu être appelée « capitale des extrêmes droites radicales ». Alain Chevarin, Lyon et ses extrêmes droites, Éditions de la Lanterne, 2020, 132 p., 16,50 €.
Cette contribution a été initialement publiée dans l’Émancipation syndicale et pédagogique, n°2, octobre 2020. Site de la revue : http://www.emancipation.fr/ |
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