![]() Soyons réalistes. L’éducation ne peut qu’échouer à arrêter les entre-tueries [1] – puisque, à l’inverse, elle installe et développe la relation de dominance et la légitime. Elle est, en quelque sorte, en position de pompier pyromane. Tout pouvoir – la « couleur » de celui-ci n’importe pas – tend à devenir totalitaire, au service des dominants (quels qu’ils soient). L’éducation est son bras non-armé, la police son bras armé. « La domination totale ne tolère la libre initiative dans aucun domaine de l’existence [2]. » Plus ou mieux d’éducation, c’est conséquemment plus ou mieux de dominance [3]. Décroître en éducation, en revanche, c’est décroître en dominances. Peu d’anarchistes l’ont vu, et aucun décroissant [4] : ils pensent, sans y voir de paradoxe, qu’une « autre » éducation pourrait créer un rapport non-éducatif (de non dominant-soumis). Leurs préceptes-slogans sont du type : « Sois coopérateur, sois autonome, sois solidaire, sois non-violent, etc. ! », ou : « Aime ton prochain… ! », et ils prônent une « éducation/pédagogie émancipatrice, à la coopération, à la liberté, à la non-violence… ». Comment ces sommations morales, ces injonctions paradoxales, ces oxymores, pourraient-ils vraiment cacher et résoudre mes propres nœuds et difficultés de socialité – que j’ai moi-même intégrés via les éducations que j’ai reçues, et que j’enseigne/montre, à mon insu le plus souvent ? La question est donc : Apprendre est inné (ne s’apprend pas). L’éducation est superflue et superfétatoire [8]. Qui, par exemple, a éduqué le premier éducateur ? La seconde voie, c’est d’une part de ne plus éduquer, de ne plus perpétuer ce schéma dominant-soumis. D’autre part, c’est de ne plus davantage enseigner/montrer mes propres nœuds et difficultés de socialité. Et pour cela, non pas dire de ne pas être comme moi, mais moi-même devenir « pas comme moi », devenir « moi-même » [9]. Rompre la chaîne, ne plus être le maillon qui enseigne, à mon insu, notamment la peur et la dominance qui l’habitent. Ne plus éduquer quiconque. J’y gagne en confort personnel. Et en devenant pleinement moi-même, je facilite tout naturellement des relations harmo¬nieuses, justes. A minima, je fais fonction d’agent de résilience, même à mon insu [10]. Incidemment je supprime l’action néfaste (pour la vie) de toute éducation [11]. Je contribue à/facilite l’épanouissement d’au¬tres vies humaines. Car « jamais un homme heureux n’a troublé la paix d’une réunion, prêché une guerre, ou lynché un Noir. Aucune femme heureuse n’a jamais cherché noise à son mari ou à ses enfants. Jamais un homme heureux n’a commis un meurtre ou un vol. Jamais un patron heureux n’a fait peur à ses employés [12]... » Pourquoi être simplement moi-même9 m’est-il difficile ? Parce que j’en été empêché/détourné : j’ai été éduqué, c’est-à-dire entraîné à me situer par rapport aux autres en terme soit de dominant soit de soumis – et non par rapport à ma « boussole » intérieure. Et parce que mon environnement ne m’y incite nullement. « La spontanéité est le plus grand de tous les obstacles à l’exercice d’une domination totale sur l’homme. Le pouvoir total ne peut être achevé et préservé que dans un monde de réflexes conditionnés, de marionnettes, ne présentant pas la moindre trace de spontanéité [13]. » Il me suffit de voir, lucide et tranquille, comment les éducations me façonnent, comment, en voulant éduquer, à mon tour je façonne [14] et je dé-responsabilise. Alors, grâce à cette distance, je peux (encore) exercer ma spontanéité, préalablement étouffée par les éducations [15], c’est-à-dire exercer le pouvoir qu’a l’homme de commencer quelque chose de neuf Jean-Pierre Lepri, education-authentique.org [1] 85 millions d’humains tués par d’autres humains, en 1939-45, par exemple : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pertes_humaines_pendant_la_Seconde_Guerre_mondiale |
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